Festival Bach Montréal – Catrin Finch, harpe – vendredi 3 décembre 2010

La harpe ! Quel instrument mythique par excellence. Une cinquantaine de cordes disposées en colonne et attachées à un bâtit de bois triangulaire, et dont les doigts doivent connaître par « chœur » la position de chacun de ces fils, et sept pédales pour les altérations. En définitive, un instrument pas simple du tout à toucher.

Malgré qu’elle soit vieille comme l’archer et possiblement l’un des premiers instruments de musique inventés, avec la flûte, par l’homme ou la femme; la femme tiens ! Mon épouse me faisait la remarque que la grande majorité des harpistes sont des femmes. En fait, je n’ai jamais vu d’homme jouer de la harpe classique. La harpe celtique oui, mais pas la classique, sûrement que ça existe. Toujours est-il que ce vieil instrument n’a de répertoire que depuis quelque 200 ans, depuis que Sébastien Érard a inventé la harpe chromatique, l’ajout des sept pédales et du savant mécanisme qu’il implique pour créer les dièses et les bémols.

Ce préambule m’amène à commenter la double découverte que j’ai faite au Festival Bach Montréal ce vendredi 3 décembre : une harpiste charmante comme un ange, métaphore aillée presque cliché, mais combien vraie en ce qui concerne Catrin Finch, harpiste du Royaume Uni surnommée « La reine des harpes »; l’autre découverte est l’ajout incroyable au répertoire de cet instrument : les variations Goldberg (J. S. Bach), pièces originellement composées pour clavecin à deux claviers. Catrin Finch a fait elle-même la transposition des 32 pièces (deux airs et 30 variations), du coup elle enrichit le répertoire de la harpe et lève la barre un peu haute pour les autres harpistes. Un véritable tour de force. Et il s’agit non moins d’un exploit de les jouer : nous avons eu entre 60 et 75 minutes de musique, sans arrêt ! Une musique déjà compliquée à jouer sur le clavecin. Des passages endiablés et truffés de contrepoints, de canons, de passages extrêmement rapides, etc. Il va sans dire qu’elle a relevé ce défi avec brio.

Au-dessus de toute ces informations intéressantes, il y avait quelque chose de plus à ce concert, au risque de me laisser psychanalyser à travers mes propos, j’avoue que non seulement l’interprétation que la harpiste nous a offerte était plus qu’excellente, mais aussi, j’ai été charmé par l’artiste même. Par sa façon de « parler à » son instrument, de « parler avec » son instrument. Parfois elle me donnait l’impression d’être la mère des cordes, qu’elle disait à chacun de ses enfants comment et quand chanter; puis la voilà qui sourit comme une enfant comme si charmée par une chanson que sa mère (la harpe) lui chante; et enfin, vous me voyez venir, comme une amante qui tient dans ses bras son amoureux, à qui elle se confie, j’oserais dire à qui elle se donne de toute son âme. Cette espèce de trilogie féminine reste inexplicable pour moi, ce sont des émotions ressenties et vécues par une espèce de communion qu’un auditeur peu avoir avec un artiste quand la distance qui les sépare n’est que de quelques mètres… Mais, toute de même, les faits sont là : la majorité des harpistes sont des femmes et cet instrument remonte à l’origine de l’humanité.